Shelburne – Cape Cod

25 octobre – 8 novembre 2021

Il était une fois des petits voiliers patients qui se gelaient les fesses en attendant le bon moment pour naviguer vers le sud…

Il y a pire endroit que Shelburne pour attendre une bonne fenêtre météo. Franchement, malgré que la marina ait été démunie de ses quais la semaine d’avant, on était accueillis avec générosité par tout le monde qu’on a côtoyé pendant notre séjour – dont le maître de port qui venait ouvrir le clubhouse tous les matins entre 9 et midi pour qu’on puisse prendre une douche, ou faire un lavage. Il avait aussi gardé l’eau et l’électricité sur le quai de fuel pour qu’on puisse se ravitailler. On était invité à participer aux soirées sociales du mardi et du vendredi. On s’est fait offrir de prendre une bouée de mouillage perso d’un membre du club pour être bien protégés pendant les grands vents qui étaient annoncés. Bref, on se sentait bienvenus, et ça réchauffait nos cœurs de marins refroidis par les feuilles qui n’étaient plus dans les arbres, et les décorations de Noël qui prenaient de plus en plus d’espace dans les étalages de la quincaillerie (et ce, avant que l’halloween soit passé… ça c’est mal).

Notre mouillage bien protégé – merci à M. Herb de Ali Cat – était situé à un endroit très précieux dans le village : directement derrière la quincaillerie! Et il se trouve que, vous vous doutez bien, la quincaillerie, c’est notre magasin préféré à tous les trois! Alors on était aux anges! Qui est-ce qui est déjà aller à la quincaillerie en dinghy? Hein??? Ben nous là là, on pouvait faire ça tous les jours!

Sans blague, c’était un mouillage parfait, on était super bien protégés, et on a passé les quelques jours de mauvais temps bien tranquilles à bord de Sage. On ne sait pas trop à quelle vitesse les vents ont soufflé, mais on gitait dans les puffs, et on spinnait (lentement) sur notre tangon. Je dis bien lentement, parce qu’avec un dinghy plein d’eau qui traîne en arrière (et je dis bien PLEIN d’eau), ça ralentit de beaucoup le mouvement du bateau.

À part se cacher du mauvais temps, on a lunché au Scotia Lunch, bu un verre à la microbrasserie Boxing Rock, soupé au Yacht club, magasiné à l’épicerie, à la pharmacie et au Bargain shop. En s’en venant à Shelburne, j’ai comme réalisé que je manquais d’option pour mettre plus de couches de linge quand j’avais froid. Quand ça rentre pus en dessous du manteau, tu fais quoi? Ben tu vas au Bargain shop et tu t’achètes des culottes de ski (pour homme), une veste de chasse doublée en minou (pour homme), des gros bas en minou, et une grosse tuque doublée en minou! Pis tu mets tout ça par-dessus ton kit!

Bon, c’est pas un kit à l’épreuve de la pluie, mais ça valait la peine quand même, parce que quand y fait frette, y fait encore plus frette sur l’eau.

Parlant de kit à l’épreuve de la pluie… un bon matin, Rémy a eu besoin de bouger tout d’un coup. Bon, c’est vrai que quand il fait mauvais dehors, et qu’on est au mouillage sur un bateau de 38 pieds, on ne peut pas aller prendre une marche bien loin quand on a des fourmis dans les jambes. Sauf que ce matin-là, juste sortir dehors 1 minute était presqu’un sport extrême. Donc au moment où il mouillait et ventait le plus, Rémy décide que c’est maintenant qu’il va faire une livraison de raisins en dinghy (je vous raconte l’histoire des raisins après). Voici Rémy avant et après sa mission :

L’histoire des raisins, c’est que parmi les gens gentils qu’on a rencontrés à Shelburne, il y a Sylvie, une québécoise expatriée dans la nature de la Nouvelle-Écosse depuis presque 2 ans. Elle nous a promenés pour nous montrer un peu les environs, et quand on est allé faire un tour chez elle, on a ramassé des raisins! Mais on en a ramassé bien trop! On ne pouvait pas manger tout ça à trois, on a donc partagé notre récolte avec les autres bateaux! Le spot incroyable de Sylvie avec vue sur l’océan… regardez ça comme c’est cute!

Son chum Patrick, un sympathique marin français, est en train de se construire une maison quelques minutes plus loin. Lui aussi il a une vue sur l’eau. Et une chouette cabane autosuffisante dans laquelle il habite en attendant!

Pendant qu’on était là, il y a eu l’Halloween!!!! On a festoyé avec nos amis de Big Fish, Mireille et Hugo, et on a bricolé nos citrouilles avec créativité tout en se racontant plein d’histoires de marin (c’est pas si pire que les histoires de pêche, ne vous inquiétez pas).

Dans les jours qui ont suivi, la météo se calmait, les plans se concrétisaient pour une traversée vers l’ouest. Tout le monde partageait son point de vue, ses plans, ses inquiétudes et ses idéaux. Certains partaient plus tôt, plus tard, un peu plus vers l’ouest, ou un peu plus vers le sud. Certains étaient limités par leur équipage poilu à 4 pattes. D’autres étaient prêts pour la Virginie diectos en 5 jours. Peu importe, c’est précieux l’entraide entre marin, on gardera de bons souvenirs de vous, Big Fish, Calmalo, Maggie… et on espère sincèrement vous recroiser sur notre chemin vers la chaleur!

C’est un départ pour nous. On a préparé de la bouffe, fait une dernière petite épicerie, bien chargé nos batteries, inspecté le moteur, et c’est parti!

Jour 1

0900 : On sort de la baie à moteur, on prépare les voiles à poste, on réinstalle les lignes de vie. Le vent est calme.

On tire à la courte paille pour les quarts :

Quarts

On watch

Stand by

Off watch

0000 – 0400

Mag

Christian

Remy

0400 – 0800

Christian

Remy

Mag

0800 – 1200

Remy

Mag

Christian

1200 – 1600

Mag

Christian

Remy

1600 – 2000

Christian

Remy

Mag

2000 – 2400

Remy

Mag

Christian

1000 : Il y a plusieurs bateaux de pêches dans les environs. On les garde à l’œil pour s’assurer qu’il n’y a pas de route de collision entre nous.

1030 : Un bateau de pêche nous appelle sur la VHF, il nous demande où on s’en va, d’où on vient, il est curieux. Il nous dit que si nous étions plus proche il nous aurait donné du poisson frais! Avoir su… on ne se serait pas donné tant de misère à s’en éloigner!

1200 : On commence à perdre la côte de la Nouvelle-Écosse de vue, le vent se lève, on hisse les voiles, on est au près bon plein, tribord amure.

1800 : Toujours au près bon plein, on avance bien, le vent a forci un peu, on a pris un ris en prévision de la nuit pour être plus relax.

2000 : On prend un 2e ris, le vent a encore forci, on a une grosse gite et ça devient un peu inconfortable, mais on avance à toute allure. Quelques embruns viennent se fracasser sur le dodger de temps en temps. On essaie de rester au sec, et surtout sans sel…

2300 : Rémy est en petite boule sous le dodger, gelé comme une crotte. Il n’y a plus assez de biscuit soda pour régler son cas, il nourrit les poissons.

2400 : Il fait froid, on est fatigué, on se cache derrière le dodger pendant tous nos quarts. Ah qu’on l’aime ce dodger en ce moment!

Jour 2

0100 : Je pogne un petit coup de fatigue, j’ai froid, j’ai le cœur sur le flotte, mais ça dure 2 minutes, je nourris les poissons, et ça passe. (J’ai mis une patch anti-mal-de-mer pour la première fois de ma vie avant de partir, ça marche plutôt bien, à part ce mini épisode, je n’ai pas eu le mal de mer du tout!)

0400 : Le vent se calme un peu, on est au travers, on gîte moins, c’est plus facile de se reposer.

0800 : Le jour se lève, on a ralenti pas mal, on largue un ris… puis un 2e peu de temps après. On est content de voir le jour se lever, mais on sent bien la fatigue accumulée.

1200 : Le vent tombe encore, la houle commence à gagner sur le vent. Les voiles se débâtissent à chaque vague qui nous prend de travers. On n’a pas le choix d’affaler. Et voici ce que ça donne en mer, quand le vent meurt avant la houle…

1400 : Surprise! On a de la visite! Un troupeau de dauphins qui jouent à saute-mouton autour du bateau! Quel spectacle!

0300 : Les dauphins reviennent jouer avec nous. On ne se tanne pas. Il fait beau soleil, ça nous réchauffe un peu.

So long, so long, and thanks for all the fish!

1900 : On est toujours au moteur, ce bon Perkins tout reconstruit ronronne doucement et fait exactement ce qu’il a à faire : continuer de ronronner. On se prépare pour la 2e nuit. On s’habille avec tout ce qu’on a. On a l’air d’une gang de toutous bien dodus.

Jour 3

La nuit se passe sans tracas, on commence à prendre le beat.

0400 : Le vent se lève, on rehisse les voiles, toujours tribord amure.

0600 : Land aho! Cape Cod est en vue!

0700 : Dès que le soleil se lève et qu’on a du réseau, on est à moins de 3 miles de la côte, j’envoie notre demande de dédouanement à travers l’application CBP ROAM. Environ 20 minutes plus tard je reçois un appel d’un agent des douanes de New Bedford. Tout est beau, on est good to go! Woohoo!!!!! Welcome to America!

0800 : Le vent adonne et forcit, on abat un peu dans la baie de Cape Cod, mais les vagues ont pris une ampleur un peu plus difficile à gérer. On décide de ne pas tangonner le génois en ciseau, on n’est pas pressé, on empannera plus tard au lieu. Au portant, quand les vagues sont grosses, c’est plus sécuritaire de se garder à un bon angle du vent pour diminuer les risques d’empannage accidentel.

0930 : On empanne (en mode chicken jibe) parce qu’il vente plutôt fort, et que les vagues n’ont pas diminuées. On a bien du fun par contre!

1000 : J’appelle la marina de Sandwich (oui oui, la ville à l’entrée du canal de Cape Cod s’appelle vraiment Sandwich!) pour savoir s’ils sont ouvert pour qu’on arrête remplir nos réservoirs.

1130 : On affale à l’approche du canal de Cape Cod, le bout de moteur dans la vague de côté n’est pas du tout confortable, mais bon, on n’en a pas pour longtemps. En entrant dans le canal on ralentit le moteur au idle pour se laisser du temps pour mettre les amarres et les par battages à poste. Au idle, on avance à 6,5kt… Wow, il y a plus de courant que ce que Navionics nous dit!

1200 : Après une entrée en crabe dans la marina de Sandwich, on fait le plein de diesel, et on repart. Départ plutôt Rock’n Roll avec le vent et le courant… Je vous épargne les détails, mais disons qu’on a utilisé beaucoup de défenses mobiles, qu’on n’a rien brisé… mais qu’on a eu chaud.

1300 : On file à toute allure dans le canal, on fait entre 10 et 11 kt de moyenne. Malgré notre vitesse fulgurante, on se fait dépasser par des touristes en vélo sur le bord du canal! La voile, c’est vraiment un sport d’escargot!

1400 : On arrête dans un mouillage gratuit, juste à la sortie du canal pour y passer la nuit. On se couche tôt… un repos bien mérité!

And then… let’s go SOUTH!

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This Post Has 9 Comments

  1. Suzanne

    Wow! You are tough! J’ai eu le mal de mer just a regarder tes petites videos dans la houle.
    J’ai tellement hate de vous voir, j’aurais bien aime vous avoir pour la Thanksgiving maisj je vais vous prendre quand vous pourrez. I am sending you tons of love.

  2. Anik

    Lâchez-pas, il va bientôt faire chaud!

  3. Karminou

    Bonne continuité courageux aventuriers ! et merci de nous tenir au courant.

  4. Aline

    Tellement contente de vous lire!! Magalie t’es belle dans le caroteee! Mais Rémy dans son suit à l’épreuve de toute te bat à 100 mille à l’heure!!! Je vous aime les trois pis j’ai hâte de vous voir! Ciao xxx

    1. Jocelyne

      Waww! Tellement chanceux pour le spectacle des dauphins. 🦈🐬🐋 Mais un peu moins pour le froid🌡 ❄et le mal de mer (surtout Rémy)🤢⛵alors là, je ne vous envie pas du tout. 🤪 Merci pour ce beau partage ma belle Coccinelle voyageuse! (J’étais très contente d’entendre ta petite voix en anglais sur la vidéo)👍

      1. Remy Boucher

        Bah, le mal de mer c’est pas si pire… ça s’apprivoise. Après 24h, c’est passé. (Sauf si ça implique des réparations à faire la tête en bas.)

        D’ailleurs, si c’est trop fatiguant, un Gravol et c’est réglé (dans mon cas)! Cette nuit là, c’est le frette et la paresse qui ont pris le dessus.

  5. Papa

    Super les mousquetaires! Même les plus grands navigateurs sont parfois malades. Cependant, je suis très inquiet pour les biscuits sodas!!!! Qui de vous trois s’occupe de l’inventaire des biscuits?? Blagues à part, vous êtes mes héros!
    Que de beaux souvenirs en regardant la vidéo des dauphins, car je me voyais avec ma fille entrant dans la baie de Tampa à bord de Salsa Verde.
    Bonne continuité!

  6. Gabylou

    Salut belle Magalia,

    Une mer calme ne fait jamais un bon marin!
    Bonne route avec prudence et la providence xxx
    🙏❤️🍀

  7. Lucie

    C’est magique les dauphins qui vous escortent et enchantent.
    Ça l’air facile de passer les douanes américaines.
    Vous devez rêver de la chaleur et du soleil. Vous êtes inspirants et tellement dans votre élément.
    C’est intense vivre à 3 dans un petit espace avec tous les défis que vous faites face.
    Merci de partager votre périple, c’est énergisant.

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