New York – Norfolk, VA

16 – 23 novembre 2021

Finalement, nous ne sommes pas restés trop longtemps à New York. Notre séjour dans Brooklyn fut de courte durée, pour la même raison que d’habitude : il commence à faire frette, et il faut se grouiller à faire du millage avant que les tempêtes de neige ne nous rattrapent ! On a donc profité d’une fenêtre météo-rodéo et avons largué les amarres à 4 h du matin.

C’est avec un super vent de travers qu’on a traversé la baie de New York, et avons laissé le tutu de la liberté derrière nous. La pointe de Sandy Hook, de l’autre côté de la baie, en bloquant les vagues, nous a apporté un confort apprécié. Avec une mer aplatie, et un bon vent de 20 nœuds au travers, on a battu des records de vitesse. Même avec le foc et 2 ris dans la grand-voile, le bateau était encore surtoilé. J’ai bien hâte de commander notre prochaine voile d’avant… un nouveau foc, plus plat, avec — roulement de tambour — une prise de ris ! (Les détails à ce sujet-là suivront sous peu.)

Note au sujet du vent : On n’a pas d’anémomètre sur le bateau, alors il y a toujours un petit facteur de divination dans la vitesse de vent qu’on rapporte. Quand je dis 20 nœuds, ça dépend généralement de notre observation de l’état de la mer (voir l’échelle de Beaufort), mais aussi du moment du jour, de la température extérieure et de mon état d’esprit à ce moment-là. Bref, c’est à prendre avec un grain de sel.

Mais peu importe l’interprétation, le GPS nous donnait des pointes à 8-9 nœuds, et lui, il ne ment pas.

Tout allait bien… c’est louche ;

Finalement, le vent est mourru. Ça arrive tout le temps d’même ; on pense battre des records, pis là, Éole décide qu’il est tanné, ou bien il a autre chose à faire — un pâté chinois à sortir du four ou un lavage de cheveux imprévu — pis le vent meurt. Drette de même. Pis on n’avance pu… mais bizarrement pu.

Alors on part Perkins, tuf tuf tuf, pas de problème… et on fait 3,4 nœuds, à 1500 rpm. C’est pas normal. Normalement, on aurait du faire au moins 5 ou 6 nœuds avec la mer plate qu’on avait. Alors on commence le troubleshooting :

RPM : 1500 tours (normal ; validé avec instrument optique) Courant : aucun (validé avec un bout de chemin à 180 degrés) Crab pots pognés dans la gouverne : 0 (passé la gaffe autour du bateau et contre le safran) Transmission qui glisse : non (validé avec l’instrument optique sur l’arbre de sortie) Vent de face : 0 nœud (validé avec la flaccidité du drapeau des États-Unis)

Bref… aucune raison. Le lendemain — mêmes conditions — 5,5 nœuds. Alors une seule explication possible ; l’eau du New Jersey est visqueuse.

On est finalement arrivés à Cape May à 4 h du matin après 24 h de mer. On s’est installés à l’ancre dans l’entrée du canal, juste en face de la base d’entraînement de la garde côtière. Un bel endroit tranquille.

Le lendemain, à 8 h, l’hymne national dans les speakers, les trompettes et les recrues qui gueulent leur vie en faisant des push-up. C’était très patriotique. On a passé une petite nuit là, et ensuite on est allés à une marina locale.

Ça nous a permis de laisser passer un coup de vent (dans la mauvaise direction), de remplir les réservoirs et les batteries. C’était aussi plus commode pour visiter la ville.

Tony s’est un peu moqué de nous parce qu’on est un peu paresseux de se cacher dans les marinas. C’est vrai, on est un peu paresseux, mais savez-vous quoi ? – des fois — on aime ben ça !

Cape May est une belle petite ville touristique, avec ses maisons victoriennes sur le bord de la plage — et c’était assez tranquille parce qu’on n’est pas vraiment dans le pic de leur saison touristique. Le gros vent qui ventait du mauvais bord pendant deux jours, dans notre face, avait au moins la qualité de nous apporter un peu de temps chaud. On en a donc profité pour aller sur la plage, par un beau 20 degrés. On a pris des photos avec les pieds dans l’eau, en faisait semblant que c’était chaud et en souriant même si on ne sentait plus nos orteils.

On en a aussi profité pour se familiariser avec l’accent du sud, manger de la pizza, des crab cakes (bonne suggestion de Tony) et boire un mélange savant de thé glacé (50-50 sweet-unsweet tea).

Mais après 2 jours à Cape May, Windy dit : partez d’ici !

Lendemain PM, on part en fin d’après midi, c’était un peu frais, mais nous étions prêts et ça avançait : biens repus, biens vêtus, avec un beau vent soutenu, et les vagues dans le tableau arrière. On a re-battu des records de vitesse, cette fois-ci au portant en surfant les vagues, on a enregistré au dessus de 11kt sur le GPS de Christian!

En route vers Norfolk ! (Ça se prononce Nord-Fuck… et c’est pas des jokes !) C’était quasiment trop rapide pour être rassurant… et encore une fois, juste avant d’arriver… pâté chinois. Pu de vent ; rien, niet, pouet. Ça tombait bien, on a pu rentrer à moteur dans le canal de Norfolk avec des conditions très tranquilles et idéales pour observer (du mieux qu’on pouvait les voir au milieu de la nuit), les bateaux militaires qui s’y trouvent.

J’ai vu mon lot de gros équipements dans ma vie, mais il faut dire que ces bateaux-là sont drôlement impressionnants. A un moment, Magalie me demande, toute sérieuse : est-ce que ce sont des porte-avions ? Je regarde un bateau — avec les jumelles — et ça devait avoir… gros max… 300 pieds de long ; « Ben non Magalie… un porte-avions c’est ben plus gros que ça ». Et elle de me répondre — « ben… tu comprends qu’on le voit de face là ? » Ben oui, elle avait raison (comme d’hab), on était drette devant un line-up de 4 ou 5 porte-avions. Avec les lumières qui se reflétaient parfaitement à la surface de l’eau, ça donne une perspective toute particulière à ce spectacle-là.

Parlant de reflets sur l’eau, c’est pas parce qu’on avait les jumelles rivées sur les bateaux militaires qu’on a failli se prendre un pataclan d’équipement de dredging en pleine gueule. Non non non ! On regardait à droite, à gauche, et plus souvent qu’autrement en avant, mais leur petite lumière jaune pâlotte sur le bout d’un genre de tuyau qui flotte au raz de la surface, on l’a vu pas mal à la dernière minute disons. On a crié, HAAAA !!!! Mag a sauté sur le bouton « Standby » du pilote automatique pour me libérer la barre pendant que je ralentissais Perkins au idle, et fiou… On a viré à 90 degrés environ 40 pieds devant ce pataclan non identifié. On s’est regardé les yeux grands comme des deux piasses (US !). Puis on s’est dit ­que passer proche ne comptait pas !

Pour ajouter au spectacle de lumières, en arrivant près de l’endroit où on voulait se mettre à l’ancre, on a vu un super bateau, tout illuminé. C’était le célèbre USS Wisconsin que la ville de Norfolk avait préparé pour Noël. On a essayé de prendre des belles photos, mais avec le peu de luminosité, et mon appareil photo de cellulaire cheap, je préfère vous montrer celle-ci qu’on a trouvé sur internet :

C’est beau hein !

Ça venait avec un Christmas Band live sur le bateau et un discours du Grinch qui gueule sa vie pour faire rire les enfants. (J’avoue que c’était quand même comique de l’entendre — et qu’on s’est demandé pendant un temps ce que c’était.)

Après ce spectacle de Noël, disons… différent, on s’est endormis à l’ancre, juste à côté.

Le lendemain matin 8 h… hymne national dans les speakers des chantiers de la Navy… (décidément). Mais ça tombait bien, on avait prévu faire une petite nav pour attraper la première ouverture des écluses de l’ICW en matinée.

Petit problème mineur, il y avait un pont-levis entre nous et l’écluse… et il était en entretien. C’est le bateau Maggie (Will et Becca) qu’on a croisé (ils revenaient en sens inverse) qui nous l’a laissé savoir. Alors on s’est trouvé un spot gratos pour attendre quelques jours ; un quai public à Portsmouth. Au fur et à mesure que la journée avançait, et que tous les aspirants navigateurs de l’ICW se faisaient revirer de bord à cause de l’impotent pont, notre petit spot s’est rapidement rempli. Pour faire un peu de place à tout ce monde-là, on s’est mis à l’épaule avec Will et Becca.

Avec le temps qui était disponible, Christian s’est lancé dans la confection de Pizza maison, et le résultat était étonnant !

Les jours qui allaient suivre allaient définitivement être différents… on disait au revoir à la voile dans l’océan atlantique, et bonjour à la navigation à moteur dans les canaux de l’ICW.

Notes sur l’ICW (intracoastal waterways) : Au fil des ans, les États-Unis se sont dotés d’un réseau de canaux qui permette à toute fin pratique de se déplacer tout le long de la côte atlantique sans avoir à s’aventurer au large dans l’atlantique. C’est certain que c’est un détour ; suivre des rivières sinueuses, et des canaux creusés de main d’homme est moins rapide que de passer au large – mais il y a un endroit sur la cote Est, le cap Hatteras, qui est très peu recommandable, et que la majorité des marins expérimentés évitent en passant par les terres. On a suivi leur exemple, par souci de sécurité — et parce que le détour n’est pas si long que ça finalement.

Par contre, pour ceux qui préfèrent les défis de la navigation au large, et l’air salin de l’Atlantique (comme Christian) le détour pépère dans l’ICW ne représente certainement pas la partie la plus excitante du voyage.

Par ailleurs, tant qu’à être pris à Portsmouth pour quelques jours, Christian en a profité pour magasiner les billets d’avion, les tests covid, les aéroports disponibles sur notre chemin, etc… et la conclusion c’était que :

  1. Retourner au Canada c’est un foutu bordel ces temps-ci
  2. Le meilleur moment pour prendre un avion… c’était drette là !
  3. Faire tout fitter dans ses valises, c’est un plus grand défi que prévu.

Alors notre équipier est parti… comme ça, dans un grand Uber bleu de mer.

De notre côté, on en conserve d’excellents souvenirs, et une chaussette grise toute seule… Christian, si tu lis ça, et qu’il te manque un bas précieux, dis-nous-le, on t’envoie ça par FedEx.

Prochaines aventures ; la bouette et les quenouilles de l’ICW !

Recevez une notification par courriel à chaque nouvelle publication

Juste nos histoires... aucun spam, promis!

This Post Has 10 Comments

  1. Suzanne

    Great photos! I didn’t get everything written, I have to say it’s 4am so my brain is still sleeping.
    So, is Christian gone to Canada? Is it just Mag and Remy on the Sage? Can 2 people handle the boat?
    I can’t wait to see you and ask all kind of questions and hear all (or most) of your adventures.
    Love, Suzanne

    1. Remy Boucher

      Hi Suzanne! Yes, two people can handle the boat. Actually, I think both Magalie and I could handle the boat alone if we really needed to. Three is much better on long passages (to get more rest – especially if the weather becomes difficult), but for shorter runs, the two of us can do it very safely.

  2. Karminou

    Merci de nous donner des nouvelles, toujours content de voir que tout va bien pour vous.
    On vous embrasse fort XOX .
    On attend votre prochain récit !

    1. Magalie Laniel

      Merci Karminou pour le message! J’espère que vous allez bien et que votre voyage s’en vient à vous aussi!!! Le prochain récit s’en vient… Je vous aime fort xx

  3. Louise

    Toujours fort intéressant de vous lire et de suivre vos belles aventures!!! À très bientôt, bisous!

  4. Lucie

    Coucou Magalie,
    aie vous avez fait un chrisie de bon bout.!
    La chaleur est proche et je suis vraiment contente pour vous que vous ayez pu passer les douanes, les deux doigts dans le nez. Le pire est fait vous approchez de la Floride et du bikini, pas pour Rémy, lui c’est le mono kini.
    Bonne suite navigateurs inspirants.
    Lucie de Stukely

    1. Magalie Laniel

      Salut Lucie! Oui on approche et aujourd’hui à Beaufort (NC) on était en t-shirt en train de bricoler sur le pont! Ça fait du bien de laisser la tuque et les mitaines dans le tiroir! Je vous écris la suite bientôt! Merci de nous suivre et de nous écrire! Bon hiver à Stukely xx

  5. Jocelyne

    Coucou vous deux! Tu écris bien Rémy et tu es presque aussi drôle que Mag 🙂 Vous faites une belle paire… Une question pour Mag: est-ce que tu te souviens quand tu étais plus jeune, d’avoir visité un de ces gros bateaux de la U.S Navy à ce même endroit avec ton père et moi?

    1. Magalie Laniel

      Ha! Ça devait être en allant à Virginia Beach? Je ne m’en souviens plus vraiment… j’avais quoi, 5 ans? C’est un peu loin dans ma mémoire!

  6. Papa

    C’était un vieux porte-avions impressionnant à visiter. Cependant, l’infirmerie-hôpital était vraiment petit … quand tu es matelot tu ne veux pas tomber malade.
    Quel plaisir encore de lire vos nouvelles aventures si bien racontées.
    Les mousquetaires n’existent plus!!!! Vive Beauty and the Beast!

Leave a Reply