Nouvelle-Écosse — Halifax à Shelburne

14  24 octobre 2021

Après un arrêt un peu plus long que prévu au Québec (et quelques bricoles de couture), on a trouvé le moyen de revenir au bateau avec une auto (rien de moins qu’une belle minivan !) de location le 14 octobre. À trois, avec Christian, ça valait la peine, en plus qu’on avait pas mal de bagages (comme un énorme sleeping bag d’hiver et le kit de salopettes et de manteau d’hiver à Rémy en prévision du froid). Malgré les multiples inquiétudes du capitaine, Sage nous attendait sans broncher sur un tangon (c’est comme être à l’ancre, mais sur une « ancre permanente » installée par la marina) au Armdale Yacht Club. Avant de partir, il avait fallu négocier et garder l’œil ouvert pour se trouver un tangon disponible. Presqu’un mois plus tard, il n’y avait plus que nous et 2-3 autres bateaux sur les tangons… La marina avait été désertée !

Avant de partir en mer, on avait quelques trucs à faire. Dans les priorités, il y avait : finir de réparer les winchs. On avait démanché et nettoyé le winch primaire bâbord avant de partir, et un des petits bearing était brisé. Par chance qu’on ait trouvé un endroit en ligne pour commander la pièce… et par précautions, on en avait commandé 2, d’un coup où celui sur tribord souffrait du même malaise. Hourra ! Puisque c’était bien le cas ! Le winch sur tribord nous a donné un peu plus de fil à retordre, avec une vis qui nous a cassé dans les mains, mais les gars ont réussi à extraire la résistance de son trou à coup de drill, de tourne-à-gauche, de marteau, de punch, de plus de drill, de WD40 et d’huile de coude. Tiens-toi !

Et le winch de drisse de grand-voile lui, a eu droit à un tour dans l’étau de la marina parce que suite à un certain abus de testostérone (on ne sait plus trop quand dans le passé) son petit doigt qui permet d’enligner le cordage dans le « self tailing » était brisé et déformé. TADAM ! 2 jours d’ouvrage plus tard, on avait 3 winchs de nettoyés, graissés, et surtout réparés ! (Et en bonus pour notre bon travail, on a eu droit au spectacle habituel à Armdale : le départ serré d’une petite régatte juste à côté de nous!)

Mais ne vous inquiétez pas, on n’a pas juste fait de l’ouvrage à Halifax ! On est allé visiter le centre-ville, le waterfront, le musée maritime, quelques bons restos (dont une 2e visite chez Edna ! Miam…) on a marché beaucoup de km pour se dégourdir de notre longue journée de route, et se préparer à la suite du voyage.

Ah oui… et on a aussi lavé le dinghy. Ouin… Après 1 mois au ‘dinghy dock’ à se faire coloniser par la vie marine, ça vallait drôlement la peine!

Mardi matin le 19 octobre, windy dit : c’est l’heure de naviguer vers l’ouest ! Allez-hop, on avait mis notre cadran pour ne pas partir trop tard, et on était prêt à affronter le vent frais qui nous attendait au large. La sortie de la baie d’Halifax était très relaxe, mais aussitôt sorti, on a changé le génois pour le foc, pris un ris dans la grand-voile et on avait le rail dans l’eau ! Par chance, il faisait beau soleil, mais c’était frisquet… Quand tout à coup ! Rémy descend dans le bateau, remonte aussitôt dans la descente, et me fait un signe du doigt qu’on pourrait identifier comme « viens ici », mais que je reconnais plutôt comme : oh oh… Houston, on a un problème !

  • Viens voir, ça sent le diesel dans le bateau !
  • Ah ouin ?
  • Regarde, la cale est graisseuse, il faut trouver d’où ça vient

Rémy part en mission « trouver la fuite ASAP », la tête en bas dans le fond de la cale, la tête en bas derrière le compartiment à batteries, la tête en bas dans le coffre de cockpit… Oups, ça prend des biscuits soda (je vous rappelle que ça brasse là, on est au large de Sambro). Bon, ça semble couler par la trap d’inspection sur le dessus du réservoir de diesel… 2 biscuits soda… Le wrench 10mm… 2 biscuits soda… Quelques tours de plus sur les têtes de bolts… 2 biscuits soda… Ok, ça va rester de même. Rémy est vert. Il s’étend dans le cockpit. 1 h plus tard il commence à reprendre des couleurs.

Moi, j’ai beau avoir un amour profond pour la nature et sa préservation, laissez-moi vous dire que j’aurais enduré la fuite jusqu’au port bien avant de me mettre la tête en bas dans 2 m de vagues avec les vapes de diesel en bonus. J’ai mal au cœur juste à y penser. De toute façon, la cale est étanche tant qu’on ferme la pompe ! Haha !

On a failli arrêter dans la baie Mahone pour réparer ça au plus vite, mais notre fenêtre météo (rarissime) nous a poussés à continuer toute la nuit pour nous rendre à Shelburne en un leg. Après tout, Rémy avait réussi à minimiser la fuite et ça ne coulait presque plus… Alors, pourquoi se priver de ce beau temps de voile ?

On a tiré des bords pour se rapprocher de la côte et se protéger des vagues, et la nuit fut magnifique, avec un beau 15 kt de près bonplein sur une mer presque plate éclairée par la pleine lune. J’ai proposé de faire des quarts très courts (2 h) pour ne pas qu’on se gèle trop les fesses pendant la nuit. Conclusion, ce n’était pas une bonne idée, on n’avait pas assez de temps pour se reposer. Et de toute façon, y a juste moi qui avais froid (malgré que je me sois sorti un sleeping bag dans le cockpit) ! Alors prochaine traversée, on fait des quarts plus long, et on s’organise autrement pour que le backup puisse se reposer à l’intérieur.

La seule action qu’on a eue de toute la nuit, c’était sur le quart de Rémy autour de 4 h. Un bateau de pêche (curieux ou inattentif ?) qui nous fonçait droit dessus. Les pêcheurs sont discrets quant au dévoilement de leur spot de pêche, alors ils n’allument pas leur AIS (Automatic Identification System : qui devrait sonner quand on est en route de collision avec un autre bateau qui a un AIS). Au début il voyait sa lumière rouge, mais quand il a commencé à voir la rouge et la verte, oh là là, il a fait un virement de bord instantané. Évidemment, c’est quand on est tout seul dans le cockpit, qu’il fait nuit et qu’on veut virer rapidement, que la contre-écoute de foc se coince dans le dinghy sur le pont avant ! Après une série de mots catholiques religieusement enlignés les uns après les autres, tout était rentré dans l’ordre, et Rémy ramenait Sage sur son cap.

Pas longtemps après, il a fallu encore dévier de notre route, car il y avait un party de pêche au large. 5-6 bateaux de pêche en train de pêcher on ne sait quelle sorte de bestiole à nageoires ou à tentacules, les uns à la file des autres, qui nous éclairaient avec leur gros spot à tour de rôle, en se disant probablement « quels bozos sont en train de faire de la voile à cette heure-là ? » Ce qui est impressionnant quand on navigue la nuit et qu’on rencontre ce genre de convoi-là, c’est toutes les lumières que ça génère. Chaque bateau a l’air d’un sapin de Noël, et c’est difficile de comprendre ce que c’est de loin, et surtout s’ils se déplacent vers nous ou pas. Cette nuit-là, c’était plus facile que d’habitude, car la pleine lune nous éclairait vraiment bien, alors en s’approchant, quand la silhouette des bateaux se dessinait, on pouvait mieux comprendre ce qui se passait… Mais encore là… On aurait bien aimé les voir sur l’AIS ! Sacrés pêcheurs…

Le lendemain matin il faisait beau soleil et nous avons tiré des bords pour rentrer dans la baie de Shelburne. Au début on se disait : on tire un bord, et on part le moteur rendu à l’intérieur. Finalement, on était tellement épatés de notre performance au près, on avait tellement de fun — et de bon vent — qu’on a réussi à se rendre jusqu’à la marina au près full serré ! On était en feu, et on ne sait pas trop encore comment expliquer qu’on ait réussi à faire des aussi bons tacks avec notre vieux foc tout défoncé. On aurait pu penser qu’on avait un peu de courant favorable, mais non, la marée était baissante ! Qui l’eût cru !

À Shelburne, nous avons été accueillis à bras ouverts par Hugo et Mireille de Big Fish, et Bruno de Calmalo, qui ont attrapé nos amarres. Tout ce bon monde est en attente de l’ouverture des douanes pour continuer leur route vers le sud eux aussi… La camaraderie est géniale, mais la frustration envers la situation s’accumule et les marins commencent à en avoir plein leur casque du niaisage de la frontière voisine.

On a passé 3 nuits à quai à la marina, on en a profité pour prendre des douches (quand il y avait de l’eau chaude), manger de la bonne lasagne avec les membres du club, passer une soirée dans le cockpit cosy chez Big Fish avec la famille de Calmalo, faire des commissions, faire un changement d’huile, et évidemment : changer les gaskets de trap d’inspection de diesel et nettoyer la cale de tout le bordel que la fuite avait causé en s’en venant ! Une maudite bonne chose de faite ! (restera à tester…)

Le samedi matin du 23 octobre, on déménage au mouillage au bout de la baie (gracieuseté de Herb qui nous a offert son tangon avec générosité puisque son bateau est déjà sorti de l’eau), car c’est aujourd’hui que les membres de la marina sortent les quais de l’eau. Ça commence à sentir la fin de saison en titi… et pas juste parce que les feuilles tombent des arbres, qu’il y a des décorations d’Halloween partout, ou qu’on chauffe le bateau tous les matins en se levant parce qu’il nous sort de la boucane par les narines… On a passé la journée là-bas pour leur donner un coup de main. Pendant que Rémy et Christian aidaient au décrochage des quais, moi j’ai été assigné au rôle de « hooker » ! Non, non, c’est pas ce que vous pensez… Je devais accrocher une des chaînes du forklift au quai lorsqu’il sortait de l’eau sur le trailer pour qu’on puisse les empiler dans le champ pour l’hiver. Regardez les photos, vous allez mieux comprendre leur logistique. Ils sont vraiment bien organisés les Shelburnois, et tellement accueillants ! Après la corvée, on s’est remplis de burgers, hotdogs et cidre en bonne compagnie !

Notre attente de la bonne fenêtre météo pour traverser s’avère plus longue qu’on aurait espéré. Les gars disent que j’ai pogné la « Windite »… c’est un syndrome commun chez les marins qui sont impatients et qui regardent « Windy » à tous les 10 minutes en espérant que ça ait changé pour le mieux. Il faut que je me fasse soigner… Mais je vous partage quand même quelques captures d’écran de Windy pour vous expliquer ce qui s’en vient dans la prochaine semaine… Du vent, beaucoup de vent, beaucoup trop de vent… (et c’est même pas un ouragan, c’est juste l’automne dans l’Atlantic nord… Meh!)

Il faudra être patient. Pas le choix…

En attendant, croisez-vous donc les doigts pour que mère Nature nous offre une belle fenêtre favorable d’au moins 3 jours là… avant qu’il neige SVP !!!

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This Post Has 5 Comments

  1. Suzanne Marcil

    J’ai les doights croiser. My fingers are crossed for you. Hopefully the borders will really open and the weather will be sooo good. Good luck. Patience is a virtue ( I don’t have it either). ❤️ 💕💕❤️

  2. Jocelyne

    Toujours très drôle vos histoires…Je vous souhaite une fenêtre météo favorable très bientôt. MOM XOX

  3. Tony Gibb

    Sounds like you are having way too much fun fixing things!! Welcome to boating. Only a short while left before you can head south and get warm. Don’t forget to anchor behind the Statue of Liberty when you are in New York. You can stay overnight but you can’t take the dinghy to the statue but it’s spectacular at night.

  4. Karmen Debonville

    Allo Gang ! On vous souhaite que du beau et du bon ! Soyez prudent ! Bisous XOX

  5. Papa

    Ce n’est pas drôle pour Rémi mais tu m’as fait bidonner avec les biscuits soda. Je vous encourage à avoir un bateau “nickel”, car les problèmes sur la mer sont emmerdants.
    Je vous souhaite une vitesse de coque optimale avec des vents favorables vers le Sud.
    PS: Avez-vous une bonne réserve de biscuits soda???
    Bisous et Câlins xxxxx Papa

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