Beaufort, NC – Jacksonville, FL

7 – 14 décembre 2021

Une semaine à Beaufort, c’était une bonne idée. On a eu le temps de manger plusieurs burgers, peut-être même trop de burgers, on a rencontré pleins de bon monde et on a beaucoup marché en ville. MARCHER… on ne se rend pas compte comme ça fait du bien de marcher sur la terre ferme, plus de 38’ par sortie dehors ! C’est génial faire de la voile, mais il y a un bonheur indescriptible à sentir la terre sous nos pieds quand on débarque, une terre solide qui ne gite pas ! (Aline ne serait pas d’accord avec mon énoncé… pour elle — et tous ceux qui ont le mal de terre apparemment — quand elle débarque, le sol continue de faire des vagues et de giter dans tous les sens. C’est pas des jokes, cet été quand elle était à bord, il fallait presque lui tenir la main pour ne pas qu’elle tombe en bas du quai en débarquant ! Au moins, contrairement au mal de mer, ça ne la rend pas malade.)

Une semaine arrêté, ça nous donne aussi envie de faire des petits projets de bricolage sur le bateau. Un soir, il nous ai pogné l’envie de décaper le dossier du carré. Alors on embarque dans l’auto de courtoisie de la marina (celle qui est super vieille et qui fait des drôles de bruits, pour ne pas perdre la main avec les minounes – parce que la mienne est allée faire son dernier voyage à la cour à scrap dernièrement) direction quincaillerie! Comme on est consciencieux de l’environnement, on se laisse charmer par la petite bouteille en plastique qui n’a pas de tête de mort dessus et qui se dit ‘environmentally friendly’. Hum… sachez qu’un décapant sans produit chimique, ça ne décape pas yable. Donc on est retourné échanger ça pour un vrai décapant, dans une canisse en métal avec une tête de mort dessus. Et même là, ça a été toute une job qui s’est étirée sur 2 jours!

La veille de notre départ, alors qu’on était en train de manger une bonne grosse salade dans le bateau (hey, il fallait compenser pour tous les burgers de la semaine) on a entendu siffler dehors. Pas un voisin qui fredonnait une toune de Noël, un voisin qui imitait avec un talent fou un énorme sifflet de sécurité, le genre qu’on attache sur nos vestes de sauvetage. On est sorti dehors instantanément, par chance qu’on était là… il y avait un gros bateau à moteur de 55’ style « pêche sportive de luxe » qui était derrière nous, à 1 doigt de l’hydrovane (notre régulateur d’allure) ! WOOOOO!!! Il avait perdu ses moteurs… et il dérivait dans le courant vers nous. Remy a attrapé son étrave et a réussi à le repousser un peu plus loin. Le capitaine qui était à bord en solo (Dan, un yacht broker de Liberty Landing au New Jersey qui était en train de convoyer le bateau qu’il venait de vendre à un client, ouf…) a eu un problème similaire à une histoire déjà vécue de très près l’été dernier. Sa transmission était jammée sur le reculon ! Sauf que pour nous avec nos vieux moteurs des années 80, on a plus de chance de trouver et résoudre nos problèmes au fur et à mesure. Genre « Ah ! Tiens ! Y a un boulon dans le fond de la cale, c’est peut-être celui qui relie le câble de transmission ? » Facile. Mais pour lui, dans son immense bateau à 2 moteurs full électronique moderne, euh, hey bien il faut réussir à s’arrêter en sécurité quelque part, et appeler un professionnel des gros moteurs full électronique moderne pour réparer la situation. C’est ce qu’on (et plusieurs autres marins) a réussi à faire en lui tirant des amarres pour le guider vers un ponton libre. Fiou… toute une aventure ! Dan a eu chaud je vous jure !

Il était tellement reconnaissant de notre aide, il voulait nous acheter une bouteille de rhume (eh non, ça c’est mboi qui bparle du nez bparce que j’ai attrabé le rhumbe de Rémby !) de Rhum ! Mais au lieu, je lui ai demandé une visite de son bateau, parce que ni Rémy ni moi n’avions mis pied sur un bateau à moteur de ce genre-là de notre vie, et vous nous connaissez, on est de type curieux. Dan nous a accueillis avec enthousiasme et nous a fait faire le tour. Il y avait 2 cabines ; cuisine salon à aire ouverte ; petite salle de bain avec douche ; cockpit fermé (genre Florida Room) avec siège du capitaine et chauffage ; un 2e cockpit au 2e étage pour avoir une vue d’ensemble sur les poissons à attraper ; un espace extérieur à l’arrière pour ramener les gros poissons ; deux gros coffres sous le plancher avec machine à glace automatique pour réfrigérer les poissons qui n’ont pas été chanceux cette journée-là ; et… une salle des moteurs énorme ! Tout ça pour dire que notre curiosité a été nourrie d’une nouvelle façon, que c’était très agréable de voir des bateaux différents, mais ne vous inquiétez pas, nous ne pensons pas nous faire convertir de sitôt… Quand le prix d’un plein d’essence coûte plus cher qu’un billet d’avion pour faire le tour du monde, aouch… Vive le vent… vive le vent, mais pas vive le vent d’hiver , OK? 

Mardi matin le 7 décembre, je fais un webinaire avec l’AQU, et ensuite, on décolle en direction de Charleston, SC ! On est parti avec un vent de portant d’environ 20 kt, qui a faibli dans la nuit, ce qui nous a permis de faire un moins grand détour au large de Cape Fear et couper à travers le haut fond dans une zone de 7-8 pieds d’eau juste avant le lever du soleil. Là je vous raconte ça tout simplement là, mais faut savoir que Rémy, quand y a pas au moins 10 pieds sous sa quille… il est stressé ! Donc c’était encore un de mes plans, un de ceux qui me tiennent responsable si jamais on touche le fond ! On a fait ça super tranquillement, au moteur, avec vigie en avant au cas où on verrait des vagues déferler sur des hauts-fonds (bon, à la flashlight, de nuit, on voyait pas de miles en avant, mais c’était pour le principe !), puis on est remonté le long de la côte pour se cacher dans les terres avant que la petite dépression annoncée nous passe dessus avec ses vents de 30 kt en pleine face. Timing parfait, on est rentré juste avant que le vent vire (comme quoi, des fois ça vaut la peine les shortcuts). Rendu là on aurait pu se mettre au mouillage et attendre que ça passe (et reprendre nos heures de sommeil perdu, car nous n’avions pas dormi beaucoup la veille), mais on s’est dit que tant qu’à être là, aussi bien continuer dans l’ICW au moteur jusqu’à l’autre opportunité de sortie, qui était 30 miles plus loin. C’était rendu au quart de Rémy… il s’est tapé 30 nm de canaux et de rivières sous la pluie battante pendant 4 h. Un vrai trooper… Par chance que les courants de marée étaient avec nous.

À la sortie du canal, on a repris la mer dans un vent de travers assez stable. On a hissé avec un ris dans la grand-voile et le foc (qui tire à sa fin, mais qui est toujours vivant !!!) pour être conservateur, car la nuit approchait vite. Ces deux dernières nuits-là de navigation, il n’y avait tellement personne à l’horizon, qu’on s’est permis de faire nos quarts presqu’exclusivement à partir de l’intérieur du bateau, en se mettant une alarme toutes les 15 minutes pour sortir notre tête de la descente et faire un tour d’horizon et un check du trim des voiles. Ça fait toute la différence de pouvoir faire ça quand il fait froid. Ah oui hein, vous pensez qu’il fait chaud parce qu’on est rendu dans les Carolines et qu’il y a des palmiers dans tous les stationnements d’épicerie ! Détrompez-vous… Pour faire de la distance à la voile vers le sud, nous attendons des vents portants… donc du nord. Et devinez quelle caractéristique ont les vents du nord? Ben oui… ils sont plus frisquets !

On est rentré dans la baie de Charleston après le lever du soleil et le lever de la brume. Il y avait pas mal de trafic et d’équipement de dredging un peu partout. On en a vu un en fonction d’ailleurs. C’est fou comme ça n’a pas l’air efficace. C’est une méga pince qui prend une grosse pelletée de bouette dans le fond, qui est soulevée par des câbles sur une grue, et qui déverse sa bouette dans une grosse barge juste à côté. Chaque pelletée prend environ 1 minute à s’effectuer. Quand la pelle sort de l’eau, on dirait qu’elle perd la moitié de sa bouette en chemin entre l’eau et la barge. Impossible pour mon cerveau de quantifier le temps que ça doit prendre à creuser tous les canaux de Charleston à ce rythme-là.

À Charleston on s’est mis à l’ancre du côté ouest de la ville. On avait lu pas mal avant d’arriver pour essayer de se trouver un bon spot, mais toutes les options semblaient moyennes. Beaucoup de courant et beaucoup de débris dans le fond, plusieurs personnes qui ont dit y avoir laissé leur ancre… Pas rassurant. Par chance, tout a bien été, on n’a pas chassé sur notre ancre, ni pêché de vieux frigo dans le fond. On est sorti visiter la ville un soir, c’est vraiment beau Charleston ! Sinon le reste du temps, c’était le télétravail, et les petits travaux d’entretien du bateau au soleil. Ouais, il a fait vraiment beau pendant notre petit petit séjour ici ! Mais comme toute bonne chose a une fin, le vent a fini par virer, et windy a dit : allons-y !

Dimanche matin, nous reprenions la mer pour un dernier leg avant la Floride ! Woohoo !!! On annonçait du portant, 15-20 kt tout le long, ça s’annonçait vraiment chill ! On s’est dit tient, comme on est au portant, et que le vent va virer derrière nous, pourquoi on ferait pas différent cette fois-ci et hisser les deux voiles d’avant, sans la grand-voile ! On a tangonné le foc, et déroulé le génois sur l’autre amure. Bam ! Et on filait à toute allure vers le sud. En s’éloignant de la côte, la mer se formait de plus en plus, mais le vent était stable. On annonçait un vent un peu faiblissant, mais finalement, c’est plutôt le contraire, ça a forci dans la nuit, et c’est resté bien stable jusqu’au lendemain. À un moment on s’est demandé si on ne devrait pas réduire la toile pour la nuit, juste par sécurité. Il était environ 1800, je commençais mon quart. Rémy me dit « Ça a forci un peu, on roule 6 – 6,5 kt, veux-tu qu’on réduise les voiles avant que je me couche ? » Je m’assois dans le haut des marches de la descente, je regarde le spectacle. On danse dans la vague (de 1,5 à 2 m), la girouette oscille entre le vent arrière et le petit largue, je trouve que ça va bien en titi ! Le régulateur d’allure faisait un excellent travail (on l’avait installé avant de partir, parce qu’après presqu’une semaine en autonomie, les batteries commençaient à être basses) malgré la houle qui nous ramassait par-derrière. Bref, on a laissé ça tel quel, c’était trop le fun. Et puis, le ciel était rempli d’étoiles, et Windy n’annonçait rien d’inquiétant.

Ce fût une nuit mémorable, c’était le 13 décembre, et c’était les Géminides ! C’est une pluie d’étoiles filantes, semblables aux Perséides. On ne regarde jamais ça au Québec, parce qu’y fait bien trop frette pour s’allonger dehors à ce temps-ci de l’année. On a été vraiment choyé d’être en mer, sous un ciel clair, sans lune une bonne partie de la nuit. J’ai arrêté de compter les étoiles filantes après une vingtaine. Sans blague, j’ai dû en voir au moins 50. Et ça c’est juste quand j’étais dehors, et que je regardais dans les airs ! Il faisait quand même pas très chaud…

Le lendemain matin, le ciel s’est engrisonné, mais les dauphins sont revenus nous faire un coucou. Rémy les a entendus de l’intérieur du bateau ! C’est fou comme ça a de la jasette un dauphin ! Le bateau continuait d’avancer à toute allure, en faisant des pointes régulières au-dessus de 8 kt. Ça tombait bien, parce qu’on commençait à avoir hâte d’arriver. On a clanché la partie « offshore » de ce leg-là en moins de 26 h pour 160 miles (en ligne droite), ça nous donne plus de 6 kt de moyenne. Pas mal pantoute ! Ensuite on est rentré dans la rivière St-Johns, jusqu’à downtown Jacksonville.

Enfin ! Arrivés en Floride, en terrain connu pour moi, où j’ai fait mes premières expériences de « capitaine » sur mon J/30 Salsa Verde, il y a déjà 14 ans…

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This Post Has 16 Comments

  1. Tandem Vagabond

    Bravo! Beau trajet d’accompli jusqu’à présent … déjà la Floride!! Autres belles rencontres; Dan et son “super bolide”, les Géminides, les dauphins … Et ça donne le goût de visiter Charleston! Euh … Rémy s’est-il endormi “sur la job”?!?!? Beau séjour dans le “Sunshine State” xox

    1. Remy Boucher

      No no no! Ma job à ce moment là, c’était de me reposer… et j’étais commis 100% à la tâche!

  2. Robert

    Quels beaux moments de vie enrichissants. I envy you without jealousy my heroes.
    I wish you happy moments in Florida….
    Papa xxxx Bisous

  3. Karmen Debonville

    Allo vous deux, toujours contente d’avoir de vos nouvelles, vous allez passer Noël à la chaleur, ça va faire du bien à couenne. Magalie je t’ai envoyé une carte de voeux virtuelle qui devrait être disponible le 23 décembre.
    Profitez-en pour vous reposer et recharger vos batteries. Passez un bon temps des fêtes ! Bisous XOX
    Karminou

    1. Magalie Laniel

      Merci Karmen!!! On recharge nos batteries est celles du bateau 🙂 Passez un magnifique temps des fêtes vous aussi! Gros câlins xx

  4. Lucie

    YAHOU1 BRAVISSIMO, GÉNIAL vous êtes rendu en Floride.
    Merci de me faire voyager avec vous. J’ai toujours très hâte de recevoir vos messages de votre aventure.
    Gros câlin
    Lucie

    1. Magalie Laniel

      Merci Lucie!!!! Oui enfin, on est rendu 🙂 J’espère que tu passes un magnifique temps des fêtes! Gros câlins et à bientôt xx

  5. Marie-Paule

    J’ai lu avec grand intérêt ton récit. Bien sûr, cette aventure m’intéresse au plus haut point même si je suis très ignorante de la science de la mer. Mes voeux très sincères pour la Noel et le Nouvel An. A bientôt.
    Marie-Paule

    1. Magalie Laniel

      Merci Marie-Paule pour ton message, ça fait chaud au coeur de savoir que tu voyages avec nous à travers nos histoires! Je te souhaite aussi un merveilleux temps des fêtes! xx

  6. Bruno Hippeau

    Du bonbon 😃😃😃😃

  7. Aline

    Ça faisait vraiment longtemps que j’avais eu de vos nouvelles!!!! Belle navigation que vous avez fait! Je suis vraiment contente pour vous enfin d’y être arrivé avec toutes ces contraintes covid. De regarder vos vidéos ça me donne juste le goût de mettre ma vfi et de sauter dans mes bottes! Ah j’ai hâte de vous revoir. Passez un beau Noël 🥰🥰🥰🥰🥰

    1. Magalie Laniel

      Aliiiiiine!!!! Nous aussi on a hâte que tu remettes ta VFI et que tu sautes dans tes bottes! Tiens bon… profite de l’hiver et fais du beau ski en attendant la suite de ton voyage à toi aussi 🙂 Bon temps des fêtes et gros câlins xx

  8. Suzanne

    Allô Magalie, Merci de nous partager tous ces moments d’aventure. Vraiment intéressant à lire et que dire des belles photos. Passe de très belles Fêtes. Bisous Suzanne et Michel

    1. Magalie Laniel

      Allô Suzanne et Michel! Merci pour votre message, ça fait vraiment plaisir d’avoir de vos nouvelles! Je vous souhaite aussi un merveilleux temps des fêtes, prenez soin de vous! xx

  9. Gaetan & Sherry

    On a eu le plaisir de passer un peux de temps avec Magalie & Remy a Live Oak en Floride.
    Quel plaisir de communiquer avec ces jeune voyageurs. Personellement, je prefere avoir mes pieds sur terre… mais j’apprecie les aventuriers.
    Bonne chance avec votre voyage et Bonne Annee.

  10. Jocelyne

    Coucou!
    Je vous envie juste pour les dauphins et les Géminides….AH!AH! AH!
    Vous êtes supers débrouillards tous les deux, entre ingénieurs, vous vous entendez bien…même quand il y a des pépins. Bravo!
    Continuez votre belle période des fêtes en Floride!
    Et bon début d’année 2022! (avec plus de chaleur, ça va de soi…j’espère…)
    MOM XOX

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